Statut social
30/11/2023
Suite au conclave budgétaire d’octobre dernier, une mesure est avancée par le Gouvernement De Croo. Le message est simple : faites un effort de trois ans de travail effectif au-delà de votre première date possible de prise de pension, et le Service fédéral des pensions vous offre une prime en cash.
Comment ça marche ?
3.375 euros pour la première année en plus, si effectivement travaillée
7.550 euros pour la deuxième année en plus, si effectivement travaillée
11.325 euros pour la troisième année en plus, si effectivement travaillée
Et c’est trois fois 11.325 si vous avez une carrière de 44 années à l’âge de 60 ans, ou si vous avez 43 années de carrière à l’âge de 61 ou 62 ans.
C’est important de vérifier sur MyPension votre « première date possible de pension« . Avez-vous la possibilité de prendre un pension anticipée à l’âge de 62 ans ? Ou à l’âge de 65 ans ? Ou bien seulement de prendre votre pension à l’âge légal de 67 ans ? Ca change tout. En effet, le bonus commence à compter à partir de cet âge.
Cette mesure va dans le bon sens. Mais la façon dont elle est calibrée peut poser problème à l’avenir. Y avez-vous droit ?
Donc, vous y aurez droit si vous cochez cumulativement les trois étoiles de la chance : ne pas avoir eu de retard dans la constitution de votre carrière (ou la chance de bénéficier d’assimilations) + être en forme à l’approche de votre pension + avoir une activité indépendante ou un employeur en capacité de vous laisser actif à ce moment-là.
L’objectif-même de la proposition Lalieux-Clarinval est trop limité. C’est énormément de dépenses alors que la mesure ne cible qu’un nombre limité de personnes.
Dans l’avis que va rendre le Comité général de gestion pour le statut social des indépendants, les critiques sont nombreuses : 1° on malmène la notion de date normale de prise de pension, 2° le bonus n’est pas accompagné par la mise en œuvre de corrections d’équité actuarielle (corrections à la baisse en cas d’anticipation), et 3° il n’y a pas de vérification d’une condition de carrière effective (la condition porte sur les seules trois années visées par le bonus).
Le bonus de pension « carrière longue », surtout en capital, n’est pas une mauvaise idée en soi.
Pour UCM, il est possible de rendre la mesure beaucoup plus efficiente : cela demande de renforcer le lien entre la prime et les périodes effectivement travaillées. Par exemple, on pourrait envisager d’attribuer la prime progressivement non pas sur la base des seules trois années d’activité professionnelle effective après la première date possible de début de pension, mais plutôt sur la base d’un plus grand nombre d’années d’activité effective tout au long de la carrière. Un modèle est d’octroyer un montant, année par année, à partir par exemple de la 35e année de carrière.
Comment ça marcherait ?
Une prime maximale de 22.000 euros serait attribuée à ceux qui ont effectivement travaillé de la 35e à la 45e année de carrière :
333 euros pour la 35e année de carrière, si effectivement travaillée
667 euros pour la 36e année de carrière, si effectivement travaillée
1000 euros pour la 37e année de carrière, si effectivement travaillé
…
3.333 euros pour la 44e année de carrière, si effectivement travaillée
3.667 euros pour la 45e année de carrière, si effectivement travaillée
Une telle approche aurait l’avantage de créer un instrument ayant un effet activateur non seulement dans la tranche d’âge de 62 à 70 ans, mais également dans la tranche d’âge de 55 à 65 ans. En Belgique c’est cette tranche d’âge qui est caractérisée par un taux d’emploi anormalement bas.
Par un tel couplement et une telle méthode d’octroi, l’objectif n’est plus seulement d’encourager une à trois années de travail effectif au-delà de l’âge de la première prise de pension. C’est plus largement d’encourager et de valoriser le travail effectif sur toute la deuxième partie de carrière. De ce fait l’efficience est nettement plus élevée. En outre, cet effet d’encouragement ciblerait plus largement tous les travailleurs atteignant 35 années de carrière, et pas seulement la partie limitée de la population qui bénéficie de l’accès anticipé à la pension.
Il est évident que le budget pour la mise en œuvre d’une telle prime progressive (dépenses) doit être étudié en parallèle des effets de la mise en œuvre de corrections d’équité actuarielle (moindres dépenses).
En conclusions, rappelons que les craintes sont fortes dans la population. Ces craintes sont que l’Etat ne soit plus en mesure de payer les pensions d’ici quelques années. C’est 61% chez les indépendants. Chaque mesure de dépense nouvelle se doit d’être efficace, et efficiente. Ce sera aussi un des leitmotiv du Mémorandum UCM pour 2024. Stay tuned.
Renaud Francart
Pour ucmvoice.be